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Spécialiste de la gestion de crise sous toutes ses formes, Louis Bernard, fondateur de Layer Cake , aborde la question des réseaux sociaux en gestion de crise. « En pleine tempête, les réponses doivent être prêtes car on ne peut plus prendre son temps pour réagir ! »

Après avoir fait ses armes en gestion de crise dans diverses organisations publiques et privées, Louis Bernard a créé Layer Cake, cabinet de conseils en prévention et gestion de crises. On l’a d’ailleurs entendu dans divers médias (France 24, Europe 1…) à propos de prises d’otages, de sécurité dans les transports… Comme il est convaincu que l’action learning est la meilleure manière d’apprendre un comportement, vous le croiserez aussi en tant qu’expert des serious games. Il a d’ailleurs créé le premier serious game de sûreté de voyage d’affaires (Mr Travel). Pour compléter son CV bien fourni, signalons aussi qu’il écrit. Louis Bernard est l’auteur d’un « Lexique Managérial », d’un Hors-Série « Mieux Négocier » de la revue Management, d’une chronique hebdomadaire «Innovation Pédagogique» sur Les Carnets du Business

Louis Bernard, quel est le fil conducteur de votre carrière ?

Le fil conducteur absolu est la gestion de crise. Depuis 2004, je travaille à aider les organisations à la gestion de crises de différents ordres : humanitaires, sécuritaires, médiatiques… Le point commun de toutes ces crises est que tout est basé sur le comportement des individus. Nous travaillons beaucoup sur la compréhension des comportements humains dans des situations dégradées, car les premières décisions, quelles qu’elles soient, sont toujours déterminantes.

Puisque l’humain est au centre, tout n’est pas prévisible…

Il y a effectivement des surprises et ce que nous essayons de faire comprendre à nos clients, c’est d’accepter d’être surpris et déstabilisés. C’est le plus difficile.

Quelle est la place des réseaux sociaux dans les simulations de crise que vous organisez ?

Toutes nos simulations sont basées sur des sites web qui envoient et reçoivent des inputs de type Twitter. Ce sont des simulations de faux réseaux sociaux. Ce qui est intéressant de constater, c’est que la majorité des grandes organisations ont une connaissance très basique de l’utilisation des réseaux sociaux, et encore moins en temps de crise.

« les circuits de validation doivent être prêts et les messages préparés à l’avance. » Louis Bernard - REPUTATION 365

Qu’est-ce que les réseaux sociaux ont changé dans la gestion des crises ?

Depuis quelques années, on assiste à une augmentation de la rapidité et de la dynamique de propagation des crises. Il suffit d’un crash de drone sur une piste de ski pour provoquer une crise pour les drones. Et comme tout ça va vite, les réponses doivent aussi aller très vite. Cela implique qu’aujourd’hui, les circuits de validation doivent être prêts et les messages préparés à l’avance. Cette exigence d’immédiateté est très difficile à intégrer pour une série d’organisations.

Et le silence, par contre, est devenu inacceptable…

Exactement ! Avant, les entreprises avaient le temps de comprendre ce qui se passait avant de réagir. Aujourd’hui, par défaut il faut occuper le terrain de la communication, même avec peu de contenu. Le silence est interprété comme une velléité de cacher certaines choses.

Un autre impact des réseaux sociaux dans les crises est l’importance de la force de frappe ?

On l’a vu avec l’exemple de Tel-Aviv sur Seine, une communication de quelques activistes bien organisés peut déstabiliser une grosse organisation comme la Mairie de Paris. Le degré de déstabilisation est en fait inversement proportionnel à la taille de l’organisation.

Vous êtes vous-même très présent sur les réseaux sociaux, et depuis un certain temps aussi sollicités par les journalistes. Est-ce le fruit d’une stratégie mûrement construite ?

Non. Personnellement, je n’ai aucune stratégie. Un jour, je me suis juste dit qu’une utilisation intelligente des réseaux sociaux professionnels pouvait m’être utile. Je partage essentiellement deux types d’infos : je relaye des informations de fond en lien avec ce que nous faisons. Ensuite, je partage des réalisations de notre entreprise. Vous avez raison, c’est exactement l’inverse de ce que nous conseillons aux entreprises que nous accompagnons (rires)… D’ailleurs il est bien possible qu’avec un peu plus de stratégie, j’aurais de meilleurs résultats. Mais je fais cela uniquement sur mobile, je n’y consacre donc pas beaucoup de temps.

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Que conseillez-vous aux entreprises en matière de réseaux sociaux ?

C’est d’être acteurs des conversations générales qui touchent à ce qu’ils font. Et surtout, c’est de faire de la place pour la communication interne. Les bonnes communications de crise sont celles qui ont laissé une grande place à la communication interne. Prenons le cas VW, décrédibilisé par une ONG. Même en cherchant, on se rend compte qu’aucun article de presse ne fait état de témoignage interne à VW qui enfonce l’entreprise. Cela montre que les travailleurs de VW font toujours confiance à la marque. Pour moi, cela va être facteur de résilience essentiel dans la crise que traverse l’entreprise.

Vous êtes auteur ou co-auteur de plusieurs livres. Un nouveau projet d’écriture en vue ?

En mars-avril 2016, je vais sortir un livre sur la crise des missiles de Cuba en 1962 et sur toutes les idées que celle-ci peut nous enseigner s’appliquant à n’importe quelle crise.

Pouvez-vous déjà nous dévoiler l’un ou l’autre enseignement ?

L’un d’eux est que l’hétérogénéité d’une équipe s’occupant de la gestion d’une crise est une grande force. Les membres du clan Kennedy ont rappelé des gens avec qui ils n’étaient pas du tout d’accord parce que c’était bien plus riche que si la crise avait été gérée uniquement par des personnes qui partageaient le même avis.

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